Le flux instinctif libre : vivre ses règles sans protection hygiénique
Protections jetables bio, serviettes et tampons lavables, cups, culottes de règles. Le marché de l’hygiène menstruelle ne cesse de se réinventer depuis plusieurs années. Offrant des produits et dispositifs toujours plus innovants. Cherchant à satisfaire l’ensemble des exigences des consommatrices d’aujourd’hui : sécurité, efficacité, confort, budget, esthétique, écologie. Mais si finalement, la solution, c’était de ne plus rien porter ? Vivre au rythme de son flux menstruel pour ne plus mettre de protection hygiénique. Cette pratique, adoptée par peu de femmes (comparativement à celles qui utilisent des protections classiques pour gérer leurs règles), existe tout de même et porte un nom : le flux instinctif libre. Chez Perdième, nous défendons le bien-être féminin et le libre choix. En conséquence, comment ne pas vous parler de cette autre option ? Même si nous n’avons personnellement jamais testé le free flow instinct – on doit vous avouer que nos culottes menstruelles nous comblent entièrement –, nous pensons qu’il est important et utile d’aborder ce sujet lié à la gestion des menstruations. Qu’est-ce que le FIL ? Comment le pratiquer ? Y a-t-il des risques et contre-indications ? Est-ce réellement efficace ? Lumière sur cette méthode naturelle qui fait débat.
Le flux instinctif libre : une façon naturelle de gérer ses règles, sans protection périodique
Qu’est-ce que le flux instinctif libre ?
Le flux instinctif libre, ou « FIL » en version abrégée, est une manière de gérer l’écoulement et le recueil des pertes sanguines liées aux règles pour les personnes menstruées. Il consiste à retenir le sang menstruel à l’intérieur du vagin avant de le rejeter directement dans les toilettes au moment opportun. Cette façon de vivre ses menstruations nous vient des États-Unis, connue là-bas sous le nom de free flow instinct.
Avec le FIL, le sang des règles est recueilli dans la cuvette des sanitaires. Par conséquent, il n’y a pas – ou plus – besoin de porter une protection hygiénique. Le flux instinctif libre est donc une pratique qualifiée de « naturelle ».
Pratiquer le flux instinctif libre : ne plus porter de protection hygiénique
L’appellation, en anglais comme en français, prête à confusion. On peut effectivement penser qu’il est ici recommandé de laisser faire la nature, librement, sans intervenir d’aucune façon. Et bien non ! Ça, c’est le free bleeding (« saignement libre »), une autre démarche qui s’affranchit aussi de l’utilisation des protections périodiques.
Ne pas confondre free flow instinct et free bleeding
Le free bleeding est un mouvement féministe apparu outre-Atlantique dans les années 1970, né de la protestation contre les taxes imposées sur les produits d’hygiène féminine américains. Il prône la levée des tabous qui entourent le sujet des règles et l’empowerment (« autonomisation ») féminin.
Ses adeptes, les free bleeders, font le choix de rien utiliser, ni protection ni technique, pour collecter le sang de leurs menstruations. Elles le laissent simplement couler et imprégner leurs vêtements, et cela dans la sphère privée comme dans l’espace public.
À l’inverse, celles qui pratiquent le flux instinctif libre cherchent à identifier le meilleur moment pour évacuer leurs pertes menstruelles aux toilettes, dans le but de ne pas tacher leurs dessous ou leurs habits. C’est un exercice conscient et volontaire, basé sur la perception et l’écoute de ses sensations corporelles.
Libérer son flux menstruel aux toilettes
Le flux instinctif libre, comment ça marche ?
Pratiquer le flux instinctif libre ne signifie pas contrôler son flux menstruel au sens de « je peux tout arrêter ou tout débloquer à tout instant » (eh non, pas de superpouvoir ici !). Il est plus question de ressentir le cheminement interne du fluide menstruel, ou d’en capter les manifestations physiques. Ceci afin d’évaluer le temps dont on dispose avant de se rendre aux toilettes pour l’éliminer et de s’organiser en conséquence. Lorsque l’accès aux sanitaires n’est pas immédiat, il s’agit d’être capable de retenir le sang en soi quelque temps. Tout ceci repose sur des phénomènes physiologiques et des éléments anatomiques spécifiques du corps de la femme.
Contractions utérines, volume menstruel et discontinuité du flux sanguin
Le sang qui s’écoule lors des menstruations provient de l’utérus, plus précisément de sa muqueuse interne, appelée endomètre. Au cours d’un cycle menstruel, ce tissu s’épaissit et se vascularise sous l’influence des hormones sexuelles, ceci dans l’éventualité d’accueillir un embryon. À la fin d’un cycle, en l’absence de fécondation, la couche superficielle de l’endomètre se résorbe et s’évacue par le vagin sous la forme de saignements plus ou moins abondants. C’est l’utérus qui se contracte naturellement pour permettre l’expulsion du liquide vers le vagin.
La quantité de sang perdu lors d’un cycle tourne en moyenne autour de 50 ml. Comme expliqué dans notre article 10 infos insolites à propos des règles, cela représente deux à trois cuillères à soupe. L’élimination de ce volume sanguin ne se fait pas en continu mais par intermittence, selon le rythme des contractions de l’utérus.
L’objectif pour les personnes qui pratiquent le flux instinctif libre est de reconnaître les symptômes qui accompagnent ces contractions utérines – spasme, douleur dans le bas-ventre ou dans le dos, pression sur la vessie, etc. Ainsi, elles arrivent à détecter l’écoulement du sang de l’utérus vers la vulve et peuvent se préparer à son évacuation. S’il est nécessaire de retenir ce flux durant quelques minutes, voire quelques heures pour les plus aguerries, ce sont les muscles du périnée qui vont les y aider.
Le périnée, le muscle à contracter pour retenir le flux menstruel
Également appelé plancher pelvien, le périnée féminin est un ensemble de muscles en forme de losange situé dans le bas-ventre, une sorte de « hamac » tendu entre le pubis et le coccyx. Il a pour rôle de soutenir les organes du petit bassin – la vessie, l’utérus et le rectum –, d’assurer l’étanchéité des sphincters pour une bonne continence et d’augmenter les sensations lors des rapports sexuels.
C’est ce groupe musculaire qu’il est conseillé de contracter volontairement pour retenir le sang menstruel dans le vagin. Pas de façon constante, on vous rassure. Mais à chaque phase d’écoulement ressenti, pour retarder la progression des pertes.
Les fornix vaginaux, des petites cavités pour stocker le sang menstruel
Le vagin est fait de telle sorte que son extrémité supérieure forme un creux de part et d’autre du col de l’utérus. Les cavités ainsi créées, appelées fornix du vagin ou culs-de-sac vaginaux, capables d’accueillir quelques millilitres de liquide, permettraient au sang menstruel de venir s’y loger temporairement lorsque l’on contracte le périnée.
Une fois aux toilettes, il s’agit de relâcher complètement les muscles du plancher pelvien pour laisser se déverser le sang dans la cuvette. En général, cela se fait en même temps que l’on urine.
Le flux instinctif libre deviendrait un automatisme au cours du temps : 4 à 5 cycles en moyenne seraient nécessaires pour commencer à se sentir à l’aise.
Les avantages du flux instinctif libre : pourquoi l’adopter ?
Sceptiques ? Nous aussi. Comme apparemment toutes les initiées, avant d’avoir essayé. Même si l’on ne connaît pas le nombre de femmes pratiquant le flux instinctif libre, on trouve beaucoup de témoignages de converties sur la Toile, sous différentes formes : articles de blog, vidéos YouTube, podcasts. Ces retours d’expérience, bien qu’ils soient uniques et personnels, évoquent très souvent les mêmes motivations sous-jacentes et les mêmes bénéfices tirés de cette pratique.
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Préserver sa santé : le FIL permet de se passer de tout type de protections hygiéniques, ce qui évite de mettre en contact son appareil génital avec des substances irritantes et/ou potentiellement nocives pour l’organisme, ou de s’exposer au Syndrome du Choc Toxique (SCT) menstruel.
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Faire des économies : le FIL est une méthode gratuite ; il n’y a pas besoin de dépenser de l’argent pour acheter des protections périodiques (ou très peu au début).
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Protéger la planète : le FIL est écologique puisque c’est une pratique naturelle qui n’engendre pas de déchets.
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Pouvoir choisir sa contraception : le FIL est compatible avec tous les types de contraception.
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Se reconnecter à son corps : le FIL demande de porter son attention sur les manifestations et les sensations corporelles ; il peut donc aider à mieux se connaître, à être plus à l’écoute de soi et à se sentir mieux physiquement et psychologiquement.
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Se sentir plus libre : le FIL participe à une volonté de se libérer des contraintes et désagréments associés traditionnellement aux règles (achat de protections, mauvaises odeurs, entretien, charge mentale liée à la logistique menstruelle, etc.).
De la théorie à la pratique : pas si facile de suivre le FIL !
Jusqu’ici, le flux instinctif libre semble la solution idéale. Sur le papier, le concept paraît simple et la promesse est alléchante : vivre ses règles naturellement et librement. Ça, c’est la théorie. Mais en pratique, qu’en est-il ?
Le flux instinctif libre est-il réellement possible ?
Aujourd’hui, peu de données scientifiques sont disponibles sur le flux instinctif libre. Les principales sources d’information à ce sujet sont les témoignages et entretiens de celles qui ont adopté cette méthode et qui généralement en vantent les mérites. Mais le FIL ne fait pas toujours l’unanimité, notamment chez les professionnels de santé. Quelles sont leurs réserves ?
Le risque de contamination bactérienne
Les avis sont partagés sur la question du danger que pourrait représenter la pratique du flux instinctif libre sur la santé. Certains médecins estiment que garder le sang à l’intérieur du vagin pendant une longue période pourrait favoriser une contamination bactérienne. La plupart considèrent pourtant que le FIL ne présente aucun risque médical : le sang retenu ne serait pas assez abondant et ne stagnerait pas assez longtemps pour constituer une réelle menace.
La comparaison avec la continence urinaire : vrai ou faux ?
L’expression qui fait débat, c’est la « continence menstruelle ». La dénomination vient de l’analogie que certain(e)s établissent entre le fait de se retenir d’uriner et de retenir ses règles.
Pour les spécialistes, la comparaison n’est pas valable. L’anatomie et le fonctionnement du sphincter urinaire n’ont rien à voir avec ceux de l’utérus et du périnée. C’est ce qu’explique la gynécologue Delphine Hudry pour Rue89 : « Ça montre une méconnaissance anatomique. Éduquer le vagin pour permettre plus de souplesse, c’est possible. Gérer la continence de l’utérus, c’est impossible. »
Derrière cette notion d’incontinence, c’est aussi le risque d’infantilisation des femmes qui pose problème : « Les femmes, ces grands enfants qui ne font aucun effort pour être propres. [...] Les femmes qui ne parviendront pas à avoir de prise sur leur flux menstruel doivent-elles être taxées de manque de volonté ? Ces paresseuses qui préfèrent mettre des couches que d'être des femmes libres ! ».
La méthode du flux instinctif libre est-elle accessible à toutes ?
Ce qui suscite également la controverse, c’est le discours qui présente le flux instinctif libre comme la solution unique : celle qui conviendrait à toutes, dans toutes les circonstances.
Plusieurs situations peuvent constituer un frein ou une contre-indication à la pratique du FIL :
- Un flux menstruel très abondant : pour celles qui ont des règles très abondantes, voire hémorragiques, la méthode semble plus que contraignante à mettre en place – une attention constante portée à leurs règles et des allers et retours incessants aux toilettes ;
- L’imprévisibilité du cycle menstruel : les menstruations étant plus ou moins prévisibles, notamment selon le type de contraception utilisé, il peut être difficile de s’organiser pour s’exercer au FIL ;
- Une tonicité faible du périnée : les femmes ont un plancher pelvien plus ou moins tonique, par nature ou suite à des événements particuliers tels que l’accouchement ; même si des exercices de renforcement peuvent être réalisés pour le muscler, cela ne facilite pas l’adoption du FIL ;
- Un accès aux toilettes limité : pratiquer flux instinctif libre suppose de pouvoir se rendre facilement et fréquemment aux cabinets ; toutes celles qui ont une activité professionnelle ne leur garantissant pas ce prérequis se voient dans l’incapacité d’adopter cette technique.
Une nouvelle injonction faite aux femmes ?
Le ton employé pour parler du flux instinctif peut parfois paraître culpabilisant : un peu de bonne volonté, et le tour est joué ! C’est ce que certain(e)s reprochent au FIL : devenir une injonction supplémentaire pour les femmes, qui devraient être chaque jour plus compétentes dans toutes les sphères de leur vie. On peut par exemple lire dans l’article de Rue89 : « Avec le “free flow instinct”, on en demande encore une fois beaucoup aux femmes. On leur demande d’être absolument maîtres de quelque chose de naturel et qui coule et qui nécessite [...] d’être contenu de la façon que vous voudrez bien. [...] Il y a un moment où il va falloir arrêter de demander aux femmes de tout gérer : travail, famille, maternité, maison et flux menstruels ! »
Malgré ces considérations qui divisent, une maxime met tout le monde d’accord : l’expérience est reine. Ci-après une liste non exhaustive de conseils qui nous paraissent intéressants pour expérimenter le flux instinctif libre en toute sérénité.
Conseils et astuces pour pratiquer le flux instinctif libre
1. En avoir envie
Si essayer une nouvelle technique pour gérer vos règles vous tente, allez-y ; si ce n’est pas le cas, passez votre chemin sans culpabilité.
2. Tester, sans aprioris
Si vous partez déjà avec l’idée que cela ne fonctionnera pas, il semble peu probable que l’expérience se passe bien et que l’essai soit concluant. Irréaliste, abracadabrante, occulte, la pratique du flux instinctif libre peut laisser perplexe. Mais si vous en êtes arrivée à vouloir en faire l’expérience, c’est que quelque chose vous a plu ou vous a interpellée. Alors, mettez de côté tout préjugé, pour vous fier uniquement à votre ressenti personnel.
3. Y aller petit à petit et ne pas se mettre la pression
Toutes les adeptes le disent : le flux instinctif libre passe par un apprentissage progressif. Ne vous fixez pas d’objectifs inatteignables. La maîtrise de cette technique prend du temps. Cela implique de s’exercer durant plusieurs cycles. Vous pouvez commencer par tester le FIL uniquement à votre domicile, à proximité d’une salle de bains, seulement un ou deux jours durant votre cycle, ou avec des sous-vêtements qui ne craignent pas les taches. Si tout se passe bien lors de ces premières étapes, vous pourrez passer au niveau supérieur : pratiquer le FIL à l’extérieur, la nuit, tous les jours de vos règles, sans vous soucier de la lingerie que vous portez.
4. Boire de l’eau, souvent
Plus vous buvez d’eau, plus vous êtes susceptible d’aller aux toilettes, ce qui vous permettra d’éliminer le sang de vos menstruations régulièrement et d’ancrer ce comportement dans votre routine.
5. Utiliser une culotte menstruelle
Au début, il peut être intéressant de continuer à utiliser une protection périodique, pour gérer les éventuelles fuites et les petits loupés. Les tampons et les cups sont bien évidemment à exclure puisqu’ils ne permettent pas l’écoulement du flux menstruel jusqu’à la vulve. Porter une culotte de règles est un bon compromis au démarrage : assurer une protection discrète mais efficace qui rassure mais n’entrave pas la mécanique du flux instinctif libre. Une bonne occasion de tester les culottes menstruelles Perdième !
La culotte menstruelle Nairobi de Perdième
Écrit par cd